Risquons-nous à ce jeu, incertain et toujours aléatoire, de la définition. Une sorte d'entrée en matière pour un nouveau blog - je n'ose dire "une profession de foi"...
Définir une tradition si polymorphe, si variable dans le temps et l'espace, si peu consensuelle parmi ceux et celles qui s'en réclament, est en effet plus qu'une gageure : un vrai défi...
La franc-maçonnerie, c'est en tout cas l' a priori que je pose, n'est cependant pas seulement un mot-valise, vide de tout sens propre, et qu'on ne pourrait appréhender qu'au travers les incarnations successives ou simultanées dont son histoire nous fait apercevoir les mille facettes, parfois si surprenantes - à tout le moins si souvent déroutantes et volontiers contradictoires.
La difficulté est ici de ne pas tomber dans le piège que nous tend volontiers son caractère d'institution, lequel est à l'origine de la plupart de ses dévoiements. Pour le dire autrement, il est souvent malaisé pour un franc-maçon d'assumer la position d'un "spectateur engagé" : adepte et pourtant soucieux d'un regard distancié et critique sur la voie qu'il emprunte et l'idée qu'il s'en fait. Le risque est alors grand d'essentialiser son appartenance à telle ou telle structure, à telle ou telle sensibilité, et à se livrer à je ne sais quel révisionnisme spirituel ou moral qui aboutit à gommer toute vision différente, à ignorer plus ou moins délibérement qu'il en existe effectivement plusieurs, même si on ne partage pas plusieurs d'entre elles.
L'enjeu est le suivant : cerner les contours d'une définition "englobante" où toutes les expressions de la maçonnerie pourraient se retrouver, quitte à mettre l'accent sur une partie plutôt sou sur une autre. Du même coup, identifier les invariants et les repères fondamentaux de la démarche maçonnique.
Pierre à façonner, à ouvrager plus finement, une telle définition, nécessairement ouverte à la discussion, doit être conçue comme un programme de travail, au-delà des postures commodes et des certitudes "officielles".
Et si le "travail" des francs-maçons, leur objet fondamental, n'était pas, précisément, de s'interroger à nouveau - et sans relâche - sur le véritable objet de leur quête ?
Voici donc ma proposition:
"La franc-maçonnerie est une voie libre et volontaire de progrès moral, intellectuel et spirituel – ni magique, ni mystique, mais initiatique et visant donc, selon la formule de Mircea Eliade, « à une mutation ontologique du régime existentiel ». (Initiation, rites, sociétés secrètes, Paris, 1959)
Elle repose sur l’étude et la mise en œuvre d’un corpus symbolique et rituel qui exploite la métaphore intemporelle de la construction, trouve sa source dans les Ecritures Saintes de la tradition judéo-chrétienne ainsi que dans la pensée hermético-kabbalistique de la Renaissance, et intègre dans son développement l’illuminisme du XVIIIème siècle et l’humanisme des Lumières."